Dark Shadows

Publié le par pablo choffat

Conte vampirique

Une comédie de Tim Burton, date de sortie 9 mai 2012

En 1772, le comte Barnabas Collins est riche et amoureux. Hélas, une sorcière elle-même éprise de lui pousse la femme de sa vie dans les griffes de la mort, le transforme en vampire et le fait enterrer vivant. En 1972, Barnabas est libéré et redécouvre le monde qui a bien changé.

« Encore un film de vampire » s’écrie le quidam qui passe devant le cinéma du coin où l’affiche de Dark Shadows s’exhibe à la vue et au su de tous. Oui encore une production de type Nosferatu, à croire que même Tim Burton n’a pu échapper à cette nouvelle mode qu’est le film de vampire. 

Ces créatures sont depuis un certain temps partout, aseptisées dans les livres pour midinettes, dans les films pour préadolescentes en quête d’amour impossible, de cheveux gominés et de regards langoureux au ralenti. Mais on les retrouve aussi dans les séries TV humoristique ou non, où la luxure du vampire est poussée à l'extrême, et on en passe des meilleurs. Pourtant, le concept d'humanoïde suceur de sang est loin d’être nouveau, ce n’est pas ce bon vieux Nosferatu de Murnau qui dira le contraire. 




Au lieu de nous proposer un drame ou un film d’horreur, Père Burton nous promet une comédie, nous prends sur ses genoux et commence à nous raconter une histoire : une histoire d’amour dans laquelle Barnabas Collins (Johnny Depp) est épris de Josette DuPres (Bella Heathcote). Amoureux, riche héritier d’une famille qui fit fortune dans le poisson et qui donna son nom à la ville de Collinsport, le jeune homme a tout pour filer le parfait bonheur. Hélas, son charme ne laisse pas indifférente une servante, qui, à ses heures perdues pratiques la magie la plus noire et mérite amplement le titre de sorcière. Cette dernière, voyant que Barnabas ne serait jamais à elle, fait mourir sa femme, et fait du jeune homme un vampire. Enterré vivant, le pauvre homme passera deux cents ans pendant lesquelles le monde continue de tourner. 

À son réveil, le vampire a soif, non seulement de sang, mais aussi de revanche. Il retrouve sa descendance à savoir Elizabeth Collins Stoddard (Michelle Pfeiffer) et sa fille Carolyn Stoddard (Chloe Moretz) ainsi que Roger Collins (Jonny Lee Miller), le frère d’Elizabeth et son fils David Collins (Gulliver McGrath) qui entretient Willie Loomis (Jackie Earle Haley), sorte d’homme à tout faire de type « serviteur de savant fou », ainsi que Mrs. Johnson (Ray Shirley), une bonne presque aussi vieille que les murs. Mais aussi la jeune et belle réincarnation de Josette, Victoria Winters (Bella Heathcote encore) et le docteur Julia Hoffman (Helena Bonham Carter) psychologue alcoolique sensée s’occuper du jeune David qui dit voir le fantôme de sa mère. Tout ce petit monde habite toujours dans le château, mais celui-ci accuse mal les ans et les revers du destin. 



Barnabas décide donc de relancer les affaires, mais c’est sans compter la nouvelle première dame de la ville, la très belle entrepreneuse Angelique Bouchard (Eva Green) qui n’est autre que la sorcière qui a troqué ses chaudrons contre une grosse pile de billets verts. Tous les amateurs de Burton qui auront vu la bande-annonce auront été quelque peu interloqués devant une telle débauche d’humour qui n’est pas sans rappeler une certaine oeuvre française dans laquelle Jean Reno joue le merveilleux Duc de Montmirail et Christian Clavier le fameux Jacquouille la fripouille. La présence même de Bella Heatcote dans le double rôle de son même personnage à quelques années d’intervalles semble être une référence. Sachez qu’il n’en est rien ; au contraire du film Les Visiteurs, il suffit de peu temps à Barnabas pour se faire au nouveau monde qui s’offre à lui et bien que quelques gags se glissent ça et là, ils ne forment en tout cas pas la moelle épinière de ce conte, car c’en est un, fort sympathique et beaucoup plus adulte qu’il n’y paraît. 

Car attention ! Amateurs de gentils vampires qui ne mordent que des petits animaux sans âme et qui, au lieu de se consumer en un instant au soleil, prennent un teint pâlot et brillant. Rien de ceci dans Dark Shadows. Barnabas tue pour avoir sa dose de globule rouge, brûle à la lumière du jour et s’en cache du mieux qu’il peut. Attendez-vous à quelques scènes où le sang coulera. Voilà donc un bon point pour ce film qui remet cette créature de la nuit à sa place. 

Tim Burton a toujours eu une patte très particulière, souvent imitée, mais rarement égalée ; dès ses débuts beaucoup plus polémiques avec le superbe Edward aux mains d’argents, son style atteint ici ce qu’il avait réussi à faire il y a quelques années avec des images qui rappellent Sweeny Todd. Tim Burton continue sur sa lancée et ne surprend pas par son style qui reste malgré tout appréciable, la grisaille est constante et même lorsque le soleil brille, une sorte de noirceur semble se dégager du décor. La musique passe des classiques du film d’horreur à des tubes des années 70 d’une manière originale, ce qui n’était pas gagné d’avance, et sait venir appuyer l’action lorsque c’est nécessaire. 



Eva Green est superbe dans son rôle de sorcière démoniaque de 1972 qui n’est pour ainsi dire que la métaphore des grandes compagnies usurières détruisant les entreprises familiales, une allégorie un peu simple, mais nous sommes dans un conte, ne l’oublions pas. Helena Bonham Carter est cantonnée à un petit rôle dont elle s’acquitte assez bien ; il faut dire que depuis Fight Club, le jeu de personnage morbido-dépressif-alcoolique, ça la connaît. Quant à Johnny Depp, les yeux écarquillés il fait son métier comme il l'a fait dans beaucoup d’autres films, avec talent certes, mais encore une fois sans trop de surprises. 

On descend des genoux de père Burton finalement d’assez joyeuse humeur, content de voir que les vampires peuvent toujours faire des bons films. Tout comme Tim qui s’échine à mettre en défaut votre serviteur qui doute à chaque nouvelle œuvre, mais qui ne peut que s’incliner. 

Publié dans Critiques

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